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Le voyant
Carl Einstein, Georges Braque, (1931-1932),
trad. E. Zipruth, Paris, Éditions des chroniques du
jour, 1934, p.66-67 et 113-114, cité par Georges Didi-Huberman, Devant
le temps, Minuit, 2000, p. 159-232.
« Il se trouva enfin quelques hommes qui voulurent autre chose que
se borner à peindre et à confirmer un monde vieilli. […]
Sans doute ces peintres avaient-ils à peine pris connaissance de la transformation
qui s'était opérée dans les autres domaines. Mais ce qui
importe c'est que des hommes se mirent au travail, qui étaient possédés
par une réalité future. […]
… que l'espace n'était qu'un croisement labile entre l'homme
et l'univers. Or, la vision n'a de sens humain que si elle active l'univers
et y jette son trouble. La divination visuelle équivaut à l'action,
et voir signifie mettre en mouvement la réalité encore invisible.
[…]
On a trop souvent considéré l'art comme une tentative d'ordonner
l'image donnée de l'univers ; pour nous, l'art représente
surtout un moyen permettant de rendre visible le poétique, d'augmenter
la masse des figures et le désordre du concret, et d'accroître,
partant, le non-sens et l'inexplicable de l'existence. C'est justement en détruisant
la continuité du devenir que nous acquérons une chance minime de
liberté. Nous soulignons en un mot la valeur de ce qui n'est pas encore
visible, de ce qui n'est pas encore connu. » [C.E., Georges Braque,
p. 66-67 et 113-114].
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