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Bonjour,
Le site a déménagé. Cette page (et l'ensemble de la rubirque) n'est plus mise à jour.
Retrouvez-là à :
http://www.ouvrirlecinema.org/pages/terrain/terrain.html


On trouvera ici des témoignages sur deux formes d'expériences, de vécu de terrain(s) : des dossiers sur des ateliers ou des formations, des entretiens individuels ou collectifs sur des sujets relatifs à l'image et (ou) à la pédagogie.

Terrain : Ateliers et formations

>>>>  « Enseigner avec le cinéma ».
Rencontre avec la Pédagogie institutionnelle »
(stage enseignants et formateurs) [Lire]

>>>> « Au commencement était l'image » (atelier scolaire) [Lire]

>>>> Ateliers Lumière-Méliès (atelier scolaire) [Lire]


Terrain : entretiens

>>>> « Nous, spectateurs de La Ville noire » (entretiens avec des classes primaires) [Lire]

>>>> « L'image à la parole, fictions de jeunes vies » (entretiens individuels avec des enfants du Havre) [Lire]

>>>> Entretien avec Pierre Kuentz (spectacle vivant) [Ouvrez !]

>>>> Entretien avec une enseignante d'arts plastiques [prochainement]


Enseigner avec le cinéma.
Rencontre avec la Pédagogie institutionnelle
(Annick Bouleau)

[Télécharger en Pdf]
(un dossier plus complet sera en ligne prochainement)

Les Huitièmes Rencontres internationales Cinéma et Enfance qui se sont déroulées au Havre du 1er au 7 avril 2006 ont offert à Ouvrir le cinéma un espace, pour pratiquer (le temps d'un stage de formation) et exposer (le temps d'une table-ronde) une manière de travailler les rapports entre le cinéma et l'école.

C'est dans la rencontre avec le mouvement de Pédagogie institutionnelle qu'il a été possible de forger nos propres outils pour faire des propositions concrètes.

En cette rentrée 2006-2007, ce stage est proposé aux établissements et associations pouvant être intéressés par sa mise en place au sein de leur structure.
[Contact]

Il s'agit d'un travail de groupe à partir d’une étude de cas : un atelier d’approche du cinéma avec une classe de CM1  « Au commencement était l’image »

Le cinéma est entré à l’école. Mais habite-t-il la classe ?

Depuis un certain nombre d’années déjà, le cinéma, aux côtés des autres genres ou formes d’images, n’est plus seulement considéré comme un moyen accompagnant l’enseignement de disciplines fondées sur la relation entre un objet et une méthode (comme l’histoire, la géographie, la géologie, la sémiologie) mais il est devenu lui-même, en tant qu’objet spécifique (comme la littérature), une (nouvelle) discipline.

De l’école à l’université, on met à profit, justement, les connaissances apportées par les disciplines du premier type (histoire, sémiologie, esthétique, …) pour produire des savoirs sur les disciplines du second type (comme le cinéma), en vue de les transmettre, de les partager avec les élèves ou les étudiants, tout en étant attentifs à l’aspect sensible, émotionnel de la rencontre avec les films (dans le cas du cinéma).

Le mouvement de la Pédagogie institutionnelle fondée dans l’immédiat après-guerre autour de Fernand Oury, qui se définit à la fois comme une théorie et une pratique de la classe, peut nous apporter d’autres outils conceptuels pour imaginer notre façon de faire exister le cinéma dans la classe.

Ainsi, c’est à partir de certains de ces outils que j’ai pu comprendre davantage ce qui s’était passé lors d’un travail avec une classe parisienne de CM1. Et cela m’a permis, dans un second temps, d’élaborer des propositions « théoriques » : considérer le cinéma, dans la pratique pédagogique, comme opérateur d’une part, comme révélateur, d’autre part.

Le stage organisé dans le cadre des Huitièmes Rencontres internationales Cinéma et Enfance a eu pour objectif d’approcher concrètement certains outils théoriques de la Pédagogie institutionnelle au regard de documents produits ou utilisés lors de l’atelier avec les élèves parisiens, intitulé Au commencement était l’image (correspondance avec les élèves, textes et dessins des élèves, notes du maître, images et films vus par les élèves).
Ces documents et le dossier consacré à l’atelier peuvent être consultés sur l’Internet aux adresses suivantes :
http://ouvrir.le.cinema.free.fr/pages/terrain/terrain.html
http://ouvrir.le.cinema.free.fr/pages/plumes/enseigner_avec.html
http://ouvrir.le.cinema.free.fr/pages/plumes/Enseigner_avec.pdf

Ce type de stage se veut un véritable moment de travail de groupe, où chacun est porteur de sa propre expérience. Sa durée (trois demi-journées) favorise le partage de ces expériences. Il s’adresse à des personnes soucieuses de rencontrer et d’approfondir d’autres voies pédagogiques d’approche du cinéma.


Emploi du temps (3 x 3 heures)

#Au commencement était l’image (I) Les repères de base :

  • Connaître/savoir
  • La praxis (pratique/théorie)
  • Le désir inconscient
La correspondance avec les élèves :
  • La notion de « Collectif  » dans la P.I.
#Au commencement était l’image (II)

Les “opérateurs” de l’atelier :
  • Le rêve
  • Les mots
  • « sens, valeur, signification  » dans la P.I.
#Au commencement était l’image (III)

Ce que nous voyons, ce qui nous regarde :
  • Projection des films vus par les élèves : Labirinto di vetri rotti (Artistes & Associés), Notes on the circus (Jonas Mekas), Étude 1 (Annick Bouleau).
Ce qui nous arrive, ce qui devient une forme :
  • La « Rencontre » dans la P.I.
Conclusion : Au cours de l'atelier, Quand ? Comment le cinéma s’est-il manifesté entant qu’ « opérateur », en tant que « révélateur » ?

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Au commencement était l'image (Annick Bouleau).

Cet atelier qui a eu lieu (janvier/mars 2003) dans une classe de CM1 de l'école primaire Glacière à Paris est proposé à toutes les écoles primaires. Il peut également donner lieu à un module de formation pour les enseignants et s'intégrer à des stages sur l'éducation à l'image. [Contact]

Avant d'être des « 
spectateurs », nous sommes d'abord des « voyants ».

En prenant appui sur la notion de «pensée de l'écran» développée par Anne-Marie Christin dans son travail sur l'origine visuelle de l'écriture (L'Image écrite ou la déraison graphique, 1995, 2001, Flammarion), l'expérience du spectateur face à la projection d'images mouvantes est replacée dans le cadre plus large d'une expérience du «visible».

Sous l’influence de notre système alphabétique (hérité des Grecs et des Romains), qui a privilégié la part phonologique de l’écriture (une lettre/un son) au détriment de sa part visuelle (ce qui se «donne à voir» à partir d’un support), l’image a fini par obéir à des lois qui ne la concernait pas.

Une série de dispositifs simples va permettre de mettre en évidence ce qui est en jeu dans notre relation à l'image.

L'atelier (6 séances) a été mis en place à titre expérimental avec une classe de CM1 de l'école Glacière à Paris (janvier-mars 2003), en partenariat avec les Cinémas indépendants parisiens et les associations Ansedonia et Artistes et Associés.

Il a fait l'objet d'une intervention dans le cadre du stage organisé par le Rectorat de Paris pour l'équipe enseignante de cette école (mars 2004). C'est à partir de mes notes préparatoires et des documents (dessins, textes) élaborés par les enfants que je vous propose l'exposé de cet atelier.

Depuis, j'ai continué à m'appuyer sur cette expérience pour développer des propositions à propos des liens entre le cinéma et l'école. Cela a donné lieu à la rédaction d'un dossier Enseigner avec le cinéma. Rencontre avec la pédagogie institutionnelle.

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Ateliers Lumière-Méliès (Annick Bouleau)

[Télécharger en pdf]

L'ensemble du dossier sera bientôt disponible également en html.
Pour l'instant voici la présentation du dossier téléchargeable en pdf.
Suivra également une mise en ligne de documents annexes.


Présentation


À l'occasion du centenaire du cinéma (année scolaire 1994-1995), des ateliers de réalisation ont été mis en place dans des établissements scolaires, en liaison avec l'association « Le Cinéma, cent ans de jeunesse », par la Cinémathèque Française, la Cinémathèque de Toulouse, l'institut Lumière de Lyon,
et la maison de la Culture/Le Volcan-Eden du Havre.

Chaque élève était amené :
> à filmer en super 8 un plan d'une minute : atelier Lumière
> puis à participer collectivement à la réalisation en vidéo d'une fiction : atelier Méliès.
J'ai été chargée de ces ateliers dans deux classes du Havre.

Depuis, l'association Le cinéma, cent ans de jeunesse, poursuit ses activités en liaison avec la Cinémathèque française.
http://lecinemacentansdejeunesse.blogspot.com/

Avant d'arriver à la phase du tournage, j'ai introduit une série de dispositifs pour travailler en groupe et individuellement ce qui allait être en jeu dans la réalisation proprement dite. J'ai par la suite repris ces dispositifs pour des interventions dans des classes parisiennes, en liaison avec l'association des Cinémas indépendants parisiens (1996-1998).


Ce qui est implicite dans l’opération « Le Cinéma, cent ans de jeunesse » :

  • On est à l’intérieur d’un dispositif pédagogique et non d’un processus personnel de création. Il n’y a pas a priori de besoin, de désir de faire une image, comme cela va être le cas chez un cinéaste.

    > Et pourtant, il va falloir susciter, déclencher artificiellement ce désir d’image (peut-être une des conditions pour qu’existe vraiment une image).

    > Et pourtant, si ce désir advient, on va se trouver face à des situations de création (construction par intuition), mêlées à des situations de pur raisonnement. Il en découle que le débat qui surgit dans certains stages de formation sur la question : Les films des enfants sont-ils des oeuvres d’art ? est assez stérile. Il suffit simplement de savoir si en cours d’élaboration le cinéma a été interrogé, mis à l’épreuve, et si le film terminé est un objet cinéma ou un clône ne reproduisant que des codes dominants.

    > Travailler dans un contexte pédagogique en dehors de toute finalité scolaire (examens) ne veut pas dire forcément suivre totalement le désir premier du jeune enfant ou du jeune adolescent, mais créer aussi des dispositifs pour l’entraîner là où il ne serait pas aller de lui-même. La question première implicite serait peut-être « Que peut me dire le cinéma sur ce que je filme ? » avant « Que puis-je dire avec le cinéma sur ce qui m’intéresse ? » (Pour les classes de A3, l’ordre serait peut-être inversé)

  • On admet que l’expérience est une forme de connaissance. La transmission d’un savoir-faire ne relève pas forcément de l’expérience. Avec en arrière-plan, l’idée que l’éducation ne serait pas seulement la transmission de connaissances comme on transmet un patrimoine, mais le désir d’en apprendre toujours plus. (cf. D. Lecourt, Instruire ou éduquer ? in « À quoi sert donc la philosophie ? »)

  • Il s’agit d’un travail de groupe (parfois assez important) — et non d’un travail individuel, personnel, — autour du cinéma, aboutissant à un seul film.

    > cela implique de prévoir une économie (rapport travail à fournir/temps/matériel disponible) du projet : depuis l’idée de départ jusqu’au montage pour que le projet puisse réellement aboutir tel qu’il a été proposé (toutes les opérations seront faites par les élèves et non par les intervenants ou les enseignants)

    > cela implique que tous les élèves aient au maximum la chance d’entrer parfois directement (donc individuellement) avec le cinéma, à l’échelle du groupe, d’une façon repérable [ex: la recherche de la “règle” du film-Méliès (intuition), le caractère restrictif du cadre pour le plan Lumière “escrime” (vérification), la découverte qu’un plan de fiction pouvait être un plan Lumière (déduction)] ou non repérable (c’est le secret de chacun).

  • Il s’agit malgré tout de travailler un art, après un siècle d’existence.
    Si l’on admet qu’une pratique artistique est en grande partie une lutte, une résistance aux codes établis, ou tout au moins un détournement, une transgression de ces codes, il va falloir trouver les dispositifs pédagogiques permettant de travailler le cinéma pour ce qu’il est et de faire en sorte que les modèles ne servent pas à faire des copies. Éventuellement, travailler les “modes de production” et non pas simplement reproduire (c’est le vrai sens de la mimésis)
    Si dans la phase «Lumière» le piège était moins sournois (le dispositif Lumière, c’est le dispositif du cinéma, l’origine du cinéma constamment réinventée), cela devenait plus délicat dans la phase «Méliès» où le manque de temps “rapprochait” trop les phases de visionnement de films des phases de travail et empêchait un véritable contrôle du “mimétisme”. Le mimétisme coupant net trop de possibilités imagnitatives.

  • Les intervenants sont des “praticiens” avec leurs points de vue, leur choix, leur subjectivité. Leur façon d’appréhender le cinéma marquera leur pédagogie et donc forcément les films réalisés dans les ateliers. Et pourtant, l’intervenant devra trouver les moyens pour que cette influence n’agisse qu’au bon moment (quel bon moment ?).

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« Nous, spectateurs de La ville noire … » (Annick Bouleau)

La ville noire [Extrait Mp4] [1,8 Mo]

[Dossier au format PDF] [696 Ko]

Présentation, transcription du travail effectué avec 10 classes de CM1/CM2 (Le Havre, Dunkerque, Paris, 1996-1997) après visionnement en classe du film « La ville noire », réalisé au cours d’un atelier annuel d’initiation au cinéma que j’ai assuré au Havre en 1994-95 (Cf. Ateliers Lumière-Méliès)

Présentation :

«Et puis, on ne peut voir tout en fonction du cinéma. Il faut voir en fonction du monde.» (Roberto Rossellini, entretien avec F. Hoveyda et J. Rivette, Cahiers du Cinéma, n°94, avril 1959, p.11)

Dans le cadre des activités de l'association «Le Cinéma, Cent ans de jeunesse», j'ai conduit, au Havre, deux ateliers de réalisation cinématographique en milieu scolaire.
Le film “La Ville noire” a été réalisé par la classe de CM1 de l'école Maréchal Joffre, au cours de l'année scolaire 1994-95.

À partir de cette première expérience s’est enchaîné le désir d’une autre expérience : montrer ce travail d'enfants à d'autres enfants. Trouver des éléments qui nous permettent de donner quelques réponses à la cruelle question : « Comment parler de l'image cinématographique, à des enfants, dans le cadre de leur cursus scolaire (et non sur leur temps de loisirs), quand notre relation au monde sensible par le moyen de l’image justement, est en pleine mutation ? »

Ces intentions sont le point de départ de cette recherche.

Que l'on puisse entrevoir, croiser le cinéma, non seulement en suivant la voie tracée du patrimoine culturel cinématographique (classique ou contemporain), mais aussi, par le biais de singularités comme “La Ville noire”, telle est l'hypothèse qui la sous-tend.
Cette recherche a été menée, grâce à l'appui financier de l'association “Le Métis” du Havre, avec le soutien de la Maison des jeunes de Dunkerque et l'association des Cinémas indépendants parisiens.

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« L’image à la parole, fiction de jeunes vies »
+
« fenêtres sur... »
(Annick Bouleau)

Série d'entretiens effectués en 1994-1995 avec des enfants du Havre sur le thème “L’enfant et son territoire : son monde, le monde, le monde de l’image”. (Les entretiens complets ainsi que la série de Polaroïds, Fenêtres sur... seront en ligne prochainement. En attendant voici quelques maigres extraits (pardon pour la poussière): [1_1bis][2_2bis] )

Présentation (1995) :

«On n’entre pas dans la communication humaine par la maïeutique du dialogue, mais d’abord par la voie de l’image, c’est à dire avant tout sur le mode du formalisme.»
(Pierre Legendre, Dieu au miroir, Étude sur l’institution des images, Paris, Fayard, 1994, p. 48).

Ce qui m’intéresse, c’est l’image. L’image comme représentation. Quelle soit mentale ou mécaniste.

D’une manière tout à fait empirique, j’ai choisi de rencontrer des enfants (autour de dix ans, à quelques exceptions) dans ce petit «coin du monde» que peut être leur chambre et d’installer notre relation sur la base d’une nomenclature parlée: me dire tout ce qu’il y a dans leur chambre. Les yeux fermés. Tous n’ont pas joué le jeu.
Jeu en apparence inutile puisque tout était là. En notre présence. Mais il fallait d’abord que des mots sans enjeu concrétisent le fait que ma présence n’avait rien à voir avec le Savoir, m'me si c’était du travail que je leur demandais. (Ils savaient que je voulais en « savoir» plus sur leur quartier, sur Le Havre, leur ville, sur ce qui les entourait. Qu’il suffisait en apparence de répéter le "monde réel").
Mots-paroles sortis de leur gorge pour les impliquer, et leur faire vivre physiquement et psychologiquement cette durée (un heure en moyenne) de la rencontre.
Pour aboutir à cette pensée-image traduite en paroles. En sons.
Je ne recherchais pas des «informations» au sens courant du terme. Ce qui m’importait c’était bien de découvrir les mots et les formules au moyen desquels ils allaient donc traduire les images qu’ils avaient de leur «coin du monde», et du monde en général, en évitant au maximum, dans mes questions ou mes relances, de passer par l’affect.

Nous étions, en général, assis par terre, ou quelquefois sur le lit. j’espérais le moment où la «litanie des mots» allaient les libérer du devoir de me dire des choses «sensées». C’est arrivé parfois très vite, parfois moins vite. Quelquefois, seulement par éclairs.

Trouver le moment d’arriver à la pensée associative. À ces instants, j’ai eu souvent l’impression que nous étions sur un tapis volant. La logique avait muté. Et pourtant je ne devais pas perdre le fil. Le cheminement de la pensée sourdait au travers de leurs paroles. Dans le montage présenté ici, j’ai gardé ces cheminements de pensées: l’extrait de l’entretien est parfois long au regard de la «somme» d’informations qu’il nous donne, mais le plaisir est dans la découverte des première racines de cette pensée associative qui aboutira à la conscience.

C’est aussi la raison pour laquelle j’ai préféré la transcription écrite (la syntaxe originelle a été préservée) à une utilisation sonore, trop rapide. Il faut du temps et plusieurs lectures, peut-être, pour se rendre compte que lorsque d’une manière tout à fait incongrüe Maïko nous parle du «paysage» au cinéma, elle nous dit déjà son trouble face à la projection des «Roseaux sauvages». La nature, le soleil, la chaleur, ce sont les images-mentales qu’elle s’est autorisée à garder de ce film dont elle nous affirmera peu après qu’il ne lui a pas plu parce que cela ne la concerne pas, car c’est un film pour adolescents.
Des mots sonores, des paroles, qui modèlent, façonnent, fictionnalisent (modeler la cire: 'ceram fingere', c’est le premier sens de 'fingo') l’hétéroclite d’une jeune vie. Il ne s’agit pas de l’interpréter, mais pour l’instant, de ne croire qu’à la vérité des mots. Construire des portraits de jeunes vies. Entre le su et l’insu: entre l’image que ces enfants veulent donner d’eux m'mes et ce qu’ils ne savent pas savoir. Mais qui les a touché. Et qu’ils mettront peut-être toute une vie à découvrir.

Au bout du compte, la «prise» des Polaroïds. (Cela était convenu dans le «plan de travail».) Autant, j’avais été disponible au cours de l’entretien, autant à ce moment-là, je me suis imposée: dans la pose, dans le temps de la pose, dans l’expression… c’était ma vision de cet enfant que j’avais regardé pendant plus d’une heure. L’instant précipité de cette heure. C’est la raison pour laquelle j’ai demandé à Maïko de faire une troisième photo: qu’elle accepte de reprendre la pose qu’elle avait eue pendant toute la première partie de l’entretien, parce que je l’avais trouvée très belle.
La «vue» de la fenêtre, associée au portrait en serait, d’une certaine façon, son contre-champ. Un auto-portrait déguisé? Une façon de faire resurgir le réel au milieu de ces fictions?

Mêler en quelque sorte la science (il y a forcément un aspect sociologique dans ces entretiens) à l’art (la beauté de certains morceaux de «textes», les portraits-Polaroïd), fait aussi partie intégrante du dispositif de ce travail, et de mon travail en général. Un rêve (pas une utopie) qui aurait peut-être humblement à voir avec celui de Godard.Les 22 enfants ont été contactés majoritairement dans le milieu scolaire, par l’intermédiaire de Claudine Dragon, responsable à l’époque des activités artistiques dans le secteur primaire pour la région du Havre. André Fouché, de l’Association Le Métis m’a permis de rencontrer les enfants du quartier de l’Eure et de Mont-Gaillard.

Tous les entretiens se sont déroulés dans le lieu personnel des enfants, leur chambre, à l’exception des deux garçons de Mont-Gaillard que j’ai connus à l’association Trait-d’Union. Les extraits retenus sont regroupés suivant un montage très «flottant» pour en faciliter l’accès au lecteur, mais certains thèmes traversent beaucoup de textes (le cinéma, notamment).

Dans le dossier, Les Polaroïds sont en noir et blanc, pour des raisons financières… Les photocopies reproduisent les planches de l’exposition fenêtres sur… présentée au Volcan du Havre, lors des deuxièmes rencontres nationales cinéma et enfance organisées par Ginette Dislaire en avril 1995.

L’enquête de terrain s’est déroulée entre juillet 1994 et mars 1995. Elle a été co-financée par Le Volcan-le Havre, Le Métis, Ansedonia. Pour en présenter le cadre, le Havre et sa périphérie industrielle, j’ai demandé à Luc Moullet l’autorisation de publier le texte qu’il avait écrit en commentaire de son film Les Havres (1983). Le Havre, par certains aspects a changé, mais ce texte garde toute sa «pertinence» topographique.

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